Dans un camp de concentration
« 421 est convoqué chez le chef de camp! »
Dans la baraque de ce camp de concentration, où tous les prisonniers entassés ne sont plus que des numéros, il se fait un mouvement.
421, amaigri et pieds nus, sort de l'ombre pour se présenter à l'officier chargé de l'amener au commandant du camp de concentration dans lequel depuis sept mois, il essaie de survivre.
Flottant dans ses habits de prisonnier trop grands pour lui, il patauge dans la neige fondue jusqu'à la baraque qu'occupe le chef du camp.
Gros et bien nourri, dans cette pièce où règne une délicieuse chaleur, le commandant est assis devant une table bien garnie.
Le chef de camp
« Garde à vous! » tonne l'officier.
421 se tient aussi droit que possible, mais il ne peut détacher
ses yeux d'un paquet posé sur la table d'où s'échappent
des petits gâteaux au beurre. Les années de guerre et de
privation lui en ont fait oublier jusqu'au goût.
Le chef de camp parle la bouche pleine:
Excellent! 421, votre femme est une excellente cuisinière! Voyez-vous,
elle vous envoie chaque mois un paquet de gâteaux, mais ils sont
bien trop bons pour que je vous les donne. »
Toujours au garde à vous, 421 songe à sa femme. Au prix
de combien de privations, au prix de quels sacrifices, sa femme s'est-elle
procuré
un peu de beurre pour lui envoyer ces petits gâteaux? Elle a mis
tout son amour dans ce colis qui est là, à moins de deux
mètres de lui. Ses doigts ont touché
la ficelle qui fermait le paquet, et c'est ce gros chef de camp qui en
savoure bruyamment le contenu.
Vengeance ou pardon ?
En 421 monte une colère sourde. Il sent qu'il risque de sauter à la gorge de cet infâme, ce misérable qui mange les gâteaux de sa femme.
Mais alors qu'il sent ses muscles tendus pour bondir sur cet homme, une pensée lui traverse l'esprit: « Jean Baptiste, on l'a décapité dans sa prison ... Etienne a été lapidé, et le Seigneur Jésus a été crucifié...! Mon Seigneur a souffert plus que moi, et n'a-t-il pas dit: « Aimez vos ennemis!» N'a-t-il pas aussi dit « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu'ils font» alors même qu'on le crucifiait? Aussi du cœur de 421 s'élève une ardente prière: «Seigneur, je te remercie de ce que ton amour est dans mon cœur. Amen! »
Peu à peu, 421 sent ses muscles se détendre et c'est d'une voix presque calme qu'il s'adresse au commandant: « Monsieur le chef de camp, je vous plains de tout mon cœur, et je prie pour vous et je prierai encore davantage pour vous, car vous en avez besoin! »
Ces paroles ont comme effet de mettre en colère le chef de camp.
« Comment pouvez-vous parler d'un Dieu, alors que vous êtes prisonnier? Vous faites confiance à un soi-disant Dieu et pourtant vous manquez de tout. Moi, je ne crois en rien, et pourtant j'ai tout ce que je veux, même les petits gâteaux de votre femme que je vous oblige à me regarder manger jusqu'au dernier ».
Retour au baraquement
Lorsque quelques instants après, 421 se retrouve dans sa baraque avec les autres prisonniers, il pense à sa femme et à ses enfants; où sont-ils? Que font-ils? Pourtant malgré sa tristesse la paix de Dieu remplit son cœur. Non, Dieu n'abandonne jamais aucun des siens.
Le temps a passé, les jours ont succédé aux jours, et un moment merveilleux est arrivé: les prisonniers ont été libérés.
421 est rentré chez lui. Comme c'est bon, la paix, quand on a connu la guerre et son cortège de misères!
Visite au chef de camp
Un jour, accompagné d'un ami croyant, 421 marche dans les rues d'une ville allemande. D'une main, il tient l'adresse de son ancien chef de camp et de l'autre, un paquet: l'arme de la vengeance!
Bientôt il enfonce le bouton de la sonnette du petit appartement où l'ancien officier se terre.
421 sent son cœur battre. Derrière cette porte il y a cet homme qui lui a fait tant de mal. La porte s'entrebâille. Des yeux craintifs dévisagent les deux visiteurs.
Oui, c'est bien lui, l'ancien chef du camp.
- Pourriez-vous nous recevoir?
- Oui, entrez. Mais qui êtes-vous?
-Vous ne me reconnaissez pas?
- Non!
- 421, ça vous dit quelque chose?
L'ancien chef de camp pâlit, une expression d'effroi se peint sur son visage. Il recule. Oui, ça lui dit quelque chose!
421 poursuit :
- Les gâteaux de ma femme, ça vous dit quelque chose?
L'homme recule encore. L'ancien chef de camp balbutie:
- Alors, vous êtes venu vous venger?
- Oui, répond 421.
Il pose alors son paquet sur la table.
- Monsieur le chef de camp, je vous demande d'ouvrir ce paquet.
Celui-ci s'exécute et d'une main tremblante défait la ficelle rouge et retire le papier d'emballage. Des petits gâteaux au beurre s'en échappent. Son regard se fait interrogateur.
- Votre épouse pourrait-elle faire du café? demande 421.Vous savez, ajoute-t-il, là-bas dans le camp, vous aviez mangé tout seul; ceux-là, nous allons les manger ensemble.
Victoire de l'amour
C'en est trop. L'ancien chef de camp, s'effondre sur le canapé et pleure comme un enfant.
421 et son compagnon s'asseyent à côté de lui.
- Nous venons vous parler de Jésus, de son amour. Vous portez un lourd fardeau de péchés, vous craignez la vengeance des hommes et avez peur du jugement de Dieu. Mais Dieu vous aime et vous cherche.
Qu'est-il advenu du chef de camp? Il n'y a pas de trop grand pécheur que Jésus ne puisse et ne veuille sauver… Le chef de camp a reçu le Seigneur Jésus comme Sauveur personnel, ainsi que sa femme et ses deux filles.