L'HOMME LE PLUS RICHE DE LA VALLÉE

 

Dans la fraîcheur du matin

Devant la fenêtre de sa chambre à coucher, Monsieur Godard s'étire. Oui, vraiment, il a très bien dormi. Là-bas, derrière les montagnes, le soleil vient de sortir, et la journée s'annonce superbe. Jamais Monsieur Godard ne s'est senti plus en forme, jamais la vie ne lui a semblé plus belle. Et pour bien commencer sa matinée, il fait seller son cheval pour faire le tour de l'immense domaine dont il est le riche propriétaire.
Bientôt le voici à cheval dans la fraîcheur du matin, admirant fleurs et arbres sur les feuilles desquels la rosée n'a pas eu le temps de sécher. Son cheval foule une herbe qu'on sent épaisse. Le regard du cavalier se perd dans l'immense vallon. Tout ceci est à moi, pense-t-il, non sans fierté. Tout là-bas, il aperçoit le vieux Hans, son fidèle fermier. Il a déjà fauché et il est assis à l'ombre d'un grand arbre. Monsieur Godard lance sa monture dans sa direction.

Oh, Monsieur, j'ai rêvé...

– Ohé, Hans, comment allez-vous aujourd'hui? Mais Hans, au lieu de répondre, le visage baissé, semble parler tout seul. Ce n'est que lorsqu'il entend le cheval juste à côté de lui que Hans tressaille et se redresse.
– Oh, excusez-moi, Monsieur, je ne vous avais pas entendu arriver... Faut dire que je deviens sourd...
– Pourtant vous avez toujours votre bon sourire heureux.
– Heureux, ah Monsieur! Comment ne le serais-je pas ? J'ai tant de raisons de l'être. J'ai tout ce qu'il me faut, un toit, une bonne nourriture… c'est plus que ce que possédait mon Sauveur quand il était sur la terre. D'ailleurs, c'est justement lui que je remerciais pour la nourriture qu'il me donne. Monsieur Godard jette un coup d'œil sur le pauvre casse-croûte de Hans qui est étalé sur l'herbe: un morceau de fromage et trois tranches de pain de seigle.
C'est donc pour cela que Hans remercie son Dieu ! Monsieur Godard ne peut s'empêcher de penser à sa salle à manger, sa vaisselle de cristal, son couvert d'argent qu'en ce moment même on doit installer pour son prochain repas. Mais le vieux Hans continue:
– Oh, Monsieur, j'ai fait un rêve étrange cette nuit. J'ai rêvé du ciel, c'était magnifique ! Et puis j'ai entendu une voix qui disait: "L'homme le plus riche de la vallée mourra cette nuit", après quoi je me suis réveillé.

Allô, Docteur !

Monsieur Godard a de la peine à cacher le malaise que lui apporte ce rêve étrange. L'homme le plus riche de la vallée... c'est lui, bien sûr... Et lorsque, sur son cheval, il quitte Hans, il se sent beaucoup moins bien qu'il y a un instant.
 – Bah! Je ne vais tout de même pas gâcher ma journée à cause du rêve de ce vieux fou... Mais a-t-il vraiment le cœur en bon état? N'aurait-il pas de la fièvre ?  Il sent comme un malaise... Aussi écourte-t-il sa tournée pour rentrer dans sa magnifique demeure. Pendant que quelqu'un conduit son cheval à l'écurie, Monsieur Godard monte l'escalier monumental qui conduit à la porte d'entrée. Il se sent nerveux, inquiet, préoccupé, et à vrai dire plus très en forme.
L'homme le plus riche de la vallée mourra cette nuit... Cette parole de Hans l'inquiète. Aussi la première chose qu'il fait en rentrant, c'est de décrocher le téléphone:
– Allô, Docteur Dubois ? Oui, ne pourriez-vous pas passer cet après-midi ?... Non, je ne suis pas malade, mais venez quand même... Oui, un contrôle de mon état général. A tout à l'heure, Docteur!
Pendant le début de l'après-midi, Monsieur Godard n'arrive à s'intéresser à rien. Il tend l'oreille, attendant le fameux coup de sonnette qui amènera le médecin. C'est en plus un de ses bons amis, à qui Monsieur Dubois pourra se confier.

Qu'est-ce qui vous tracasse ?

Dring...! Ah, le voilà!
– Entrez, Monsieur Dubois. Je suis bien heureux de vous voir.
Monsieur Dubois dévisage son interlocuteur.
– Eh bien, Monsieur Godard, vous avez excellente mine, ne me dites pas que vous avez besoin d'un médecin.
Le visage du riche propriétaire se rembrunit.
– Pourtant, si vous vouliez bien m'ausculter et me dire ce que vous pensez de ma santé.
Le docteur s'exécute. Sortant son stéthoscope, il examine minutieusement son patient. L'examen terminé, il lève les yeux sur le visage anxieux de Monsieur Godard.
– Je crois que vous n'avez jamais été aussi bien portant. Mais dites-moi donc ce qui vous tracasse, ce qui ne va pas.
– Eh bien, c'est mon fermier, le vieux Hans, qui m'a bien alarmé ce matin, il m'a dit qu'il avait rêvé... que l'homme le plus riche de la vallée allait mourir cette nuit.
– Ha! Ha! Ha!, Mon pauvre ami, et c'est cela qui vous tourmente?
– Oui, c'est cela, vous riez, mais très honnêtement, moi, j'ai peur.

Nous causerons toute la soirée

– Bon, écoutez, voilà ce que je vous propose. Vous allez rester toute la soirée dans votre salon, vous allez chasser ces idées noires et, tenez, pour vous distraire, je me propose de passer la soirée avec vous.
– Bien volontiers, Docteur, nous souperons ensemble, et nous causerons toute la soirée.
La nuit tombe bientôt sur l'immense domaine, et sur le beau logis de Monsieur Godard. Monsieur Dubois essaie, par sa conversation enjouée, de distraire son hôte. La lourde horloge, là-bas, de l'autre côté du salon sonne neuf coups, neuf heures... La bonne humeur de Monsieur Dubois est communicative. Monsieur Godard se détend, il pense moins à Hans, son vieux fermier. Dix heures trente...
– Monsieur Dubois, ne voulez-vous pas passer la nuit ici? Il est tard, et je serais bien heureux de vous savoir sous mon toit.
– Si vous voulez, mais surtout, ne vous inquiétez pas.

Riche quant à Dieu 

L'horloge vient à peine de sonner onze heures, que la sonnette de la porte de la maison retentit. Monsieur Godard sursaute et se lève comme un ressort.
– Qui est là ?
Il se précipite vers la porte, suivi du docteur, et ouvre: devant la porte, se tient un paysan, chapeau bas.
– Qu'y a-t-il?
– Oh, Monsieur, je viens simplement vous dire que le vieux Hans... vient de mourir...
Monsieur Godard reste interdit. L'homme le plus riche de la vallée? C'était donc lui. Regagnant le salon, il pense à son vieux fermier, à son bout de fromage, mais à son sourire tellement heureux. Bien sûr, il possède, lui, Monsieur Godard, un immense domaine, mais Hans ne possède-t-il pas le ciel?... Son regard se promène sur les objets qui remplissent son salon. Ses tapis coûteux, son mobilier rare, ses tapisseries de prix... Combien cela lui paraît fade en comparaison du trésor de Hans: la vie éternelle, un Sauveur!
Oui, l'homme le plus riche de la vallée est mort cette nuit, mais cette richesse, Monsieur Godard désire maintenant la posséder aussi.
Et toi, es-tu riche quant à Dieu?
Jésus est venu sur la terre nous apporter le salut, la vie éternelle. Son sang précieux a coulé aussi pour toi.
Possèdes-tu ces trésors? Ils peuvent être à toi maintenant, si tu crois en Jésus qui t'a aimé jusqu'à mourir sur la croix pour te sauver.